Résumé des épisodes précédents : Sara Pezzini et Danny ShanLi sont transférés de force à Québec après le meurtre du précédent coéquipier de Sara, Matthieu, par les hommes de Kenneth Irons, et ce parce que la jeune femme lui avait volé un bracelet anthique. Celui-ci, la Witchblade, est toujours à sa main et en fait la future sauveuse de l'Humanité selon d'anciennes écritures, mais aussi celle qui contrôle l'énorme pouvoir que l'objet renferme.
La Question entre ensuite en contact avec Sara et l'emmène dans un tourbillon de folies, où ils doivent affronter un métamorphe, Ian Nottingham, envoyé pour la tuer. Là, ils tentent de s'échapper, mais le temps est aussi aux questions et aux réponses...Interrogatoire, troisième partie.
« C’est quoi la Résistance ? »
Le ton de Sara était sec, et ça montrait bien à quel point elle en avait assez de tout ça. Assise dans un train qui la menait dieu sait où, seule avec un être étrange au visage toujours recouvert d’un masque mystérieux, elle sentait que sa patience était définitivement morte, et elle avait envie de le faire savoir.
« Je t’expliquerai peut-être. »
Encore une fois, la voix monocorde de son « allié » s’était faite entendre, et encore une fois elle l’exaspérait. Très rarement, il perdait ce ton neutre, et ça ne faisait donc qu’accroître la colère et la frustration de la jeune femme, qui se laissait trop souvent aller à ses sentiments et à ses émotions. Elle ne pouvait alors accepter et surtout comprendre quelqu’un d’aussi différent d’elle, surtout qu’il était un justicier masqué, un de ces hommes qu’elle voulait voir derrière les verrous plus que tout au monde.
« Non. Maintenant. »
Elle se tourna vers lui et son regard devint encore plus noir, tandis que la plaine enneigée succédait à des collines blanches à sa droite. Le paysage était vraiment beau, et elle l’aurait sûrement plus regardé si elle n’était pas occupée à tenter de comprendre ce qu’il se passait, et surtout à tenter de se sortir de cette situation complètement folle.
Depuis quelques heures, sa vie avait prit un virage totalement dingue, et elle ne contrôlait plus rien. Enfin…déjà avant, elle ne contrôlait plus grand-chose. Depuis la mort de Matthieu par sa faute et ses déprimes, et surtout depuis son affectation forcée à Québec, Pezzini n’était plus que l’ombre d’elle-même.
Buvant souvent plus que de raison, elle s’était lentement laissée tomber dans une spirale négative, même si Danny tentait tant bien que mal de l’en sortir. Oui, la policière n’était déjà plus grand-chose avant l’arrivée de l’homme à ses côtés, mais depuis qu’il était là…c’était encore pire. Et elle n’aimait pas ça.
Cet être…cet être était la Question. Elle ne le connaissait pas, ne savait pas qui il était, mais en tout cas elle était sûre qu’il était dangereux. Il semblait en savoir énormément sur elle, et surtout sur le bracelet qu’elle avait autour du poignet droit. Elle ne savait toujours pas comment il pouvait être là, vu que normalement elle l’avait détruit elle-même après la mort de Matthieu, et ce pour énerver encore plus Kenneth Irons, celui qui avait ordonné cet assassinat.
Oui, elle ne savait pas comment ce bracelet, cette Witchblade apparemment, pouvait être là et intact. Mais la Question le savait, et il refusait de le lui dire. Pire encore, il refusait de lui dire énormément de choses, comme l’origine de ce Ian Nottingham qui les avait attaqués et qu’ils avaient enfermés dans une malle qui se trouvait à quelques mètres d’eux. Ou bien comme le pourquoi de sa venue chez elle, qui semblait tout sauf désintéressée.
Et ça, cette ignorance…Sara détestait. Et elle était bien prête à en apprendre plus, et surtout à faire comprendre à son « allié » qu’il ne fallait pas la prendre pour une faible femme sans défense.
« Hum. »
Question se tourna vers elle. Comme d’habitude, elle ne pouvait voir son visage et ses expressions, et elle détestait ça. Elle aimait voir les réactions des personnes quand elle leur parlait, de manière à pouvoir gérer sa façon de dire les choses. De même, ça lui permettait aussi de savoir quand on lui mentait ou non.
Vieux réflexe de flic, en fait. Mais avec lui, c’était impossible. Et ça la frustrait grandement.
« Je sais que tu n’aimes pas rester ignorante, Sara Pezzini. Je connais ça. J’ai aussi ce petit défaut qu’on appelle l’impatience.
- Tu me connais bien.
- Oui. Plus que tu ne le crois.
- Et je n’aime pas ça.
- Je sais. »
Il avait les bras croisés sur imperméable tâché par la neige et surtout par les éclats de balle, quand Nottingham lui avait tiré dessus sous la forme de Danny ShanLi. Sara avait crue avec horreur que son meilleur ami était devenu fou, ou pire encore qu’il l’ait trahi, et elle avait poussée un énorme soupir de soulagement au moment où la supercherie avait été découverte durant le combat.
Néanmoins, maintenant, avec le recul, elle n’était plus vraiment rassurée. Qui était ce Nottingham ? Quelles étaient ses capacités ? Qu’est-ce que c’était que ce monstre ? Qu’est-ce qu’il lui voulait ?
La Question avait dit qu’il avait été envoyé par Kenneth Irons, et ça ne l’étonnait pas vraiment. Il avait toujours eu énormément d’alliés et de connaissances troubles, et même si la jeune femme ne savait pas tout de celui qui était désormais son ennemi personnel, elle était certaine qu’il n’allait pas s’arrêter là.
Maintenant, elle ne serait plus jamais en sécurité. Du moins, tant que Irons n’aurait pas récupéré son bracelet, ou qu’il n’était pas mit hors d’état de nuire. Et c’était bien ça qui l’ennuyait.
Elle ne pouvait rendre cette chose à son poignet à ce monstre. Avant, déjà, elle s’y était refusée étant donné que son instinct lui criait que cette chose était dangereuse. Et maintenant qu’elle avait vue que ce bracelet pouvait être une arme terrible, elle ne voulait vraiment pas que Irons récupère cette chose. Qui pouvait savoir ce qu’il ferait avec ça ? Quelles horreurs il allait commettre ?
La policière ne pouvait laisser cet homme avoir un tel pouvoir. Elle devait donc le stopper, pour éviter que cela n’arrive, et pour vivre heureuse. Elle devait le stopper définitivement. Mais elle s’y refusait, car ça allait contre ses principes.
Depuis l’émergence des surhumains et des justiciers, elle avait toujours considéré ces êtres comme des hors la loi qui devaient être mis sous les verrous. Pour elle, seule la Justice et la police pouvait poursuivre et s’occuper des criminels, et pas des dingues habillés de masques et de costumes délirants. Bien sûr, leurs résultats parlaient pour eux, mais ce n’était pas l’idée de la Justice qu’elle avait. Et elle avait peur de changer d’avis avec ce qu’il se passait.
En effet, Kenneth Irons était impossible à coincer et à stopper de manière légale. Il avait trop de liens avec les gouvernants, trop d’affaires avec ceux qui dirigeaient réellement le pays pour ça. Oui, il était incoinçable.
Et donc, pour pouvoir s’en sortir et empêcher que la Witchblade tombe entre ses mains, Pezzini devrait aller contre ses principes en faisant Justice elle-même…et elle avait peur de ça.
Quelle différence y aurait-il entre sa croisade personnelle et celles de fous comme Aaron Kearse, le Punisher, ou bien d’autres comme Spider Man ou Daredevil ? Bien sûr, ils s’occupaient de criminels, mais ils en étaient eux aussi, de par leurs actions et surtout les conséquences de celles-ci. Le monde n’allait pas bien, et même si les justiciers tentaient de faire quelque chose, c’était plus du mal que du bien, finalement : ils étaient autant néfastes au système que ceux qu’ils combattaient.
En quoi serait-elle différente, alors, d’eux ? Bien sûr, elle devait arrêter Irons, mais faire ça ne voulait-il pas vendre son âme, ses convictions ? N’allait-elle pas se perdre dans ce combat ?
« Tu es soucieuse, Sara Pezzini. »
La jeune femme fut tirée de ses pensées par la voix monocorde de son allié. Tandis que le train continuait de filer dans la plaine canadienne, en direction du Nord, elle frissonna légèrement en repensant à tout ce qui était venu dans son esprit. Depuis quelques heures, sa vie était devenue une sorte d’enfer, et elle sentait que le pire était encore à venir. Même si elle était animée des meilleures idées et de la bonne foi la plus pure, ça ne changerait pas grand-chose à l’heure des comptes.
Elle devait arrêter Kenneth Irons. Mais en faisant ça, elle se perdrait. L’enfer est pavé de bonnes intentions, dit-on. Sa vie aussi, apparemment.
« Je…oui. »
Elle soupira lourdement en passant ses mains dans ses cheveux sombres. Elle était fatiguée, exténuée et extrêmement perdue. Voir Nottingham, la Question et surtout apprendre que son bracelet était une arme mystique venue du fond des âges, et ce en quelques heures à peine…c’était beaucoup, pour elle. Surtout qu’elle perdait sa vie à cause de tout ça. Qu’elle perdait le peu de proches qu’elle avait encore à cause de tout ça…
Oui, elle perdait tout. C’était pour ça qu’ils étaient dans ce train. Après l’attaque de Nottingham, la Question lui avait dit qu’ils devaient fuir pour rejoindre la Résistance, même si elle ne savait toujours pas ce que c’était et en quoi elle devait résister à quelque chose. Il lui avait expliqué que Irons savait désormais où elle se trouvait, et que sa présence à Québec ne ferait que rendre les choses plus compliquées et surtout plus dangereuses pour ses proches : Kenneth n’hésiterait pas à enlever Danny ou ses autres collègues si elle restait là.
Elle devait donc fuir au loin. Et ça lui faisait mal, même si elle savait au fond que c’était la meilleure chose à faire pour ceux, ou plutôt celui, qu’elle aimait.
« Je suis fatigué…Question. J’en ai assez de tout ça.
- Je comprends. Mais ce n’est que le début. »
Sa voix froide et monocorde perdait peu à peu de son côté terrifiant. La policière commençait lentement à s’habituer à ce ton étrange, même si elle savait bien qu’elle serait toujours mal à l’aise aux côtés de cet être.
« Le monde est en train de changer, Sara Pezzini. Les vieilles règles explosent et la situation devient encore plus folle. Ceux qui dirigent en sous-main en ont assez de voir que mes…collègues, si on veut, les empêche de profiter au maximum de leurs petites vies, et pour ça ils se déchaînent. Contre nous. »
Elle sentait qu’il était ému par ce qu’il disait. Apparemment, il n’était pas aussi insensible et inhumain qu’il voulait bien le montrer. Comprendre ça arracha un léger sourire à la jeune femme, même si elle restait toujours sur ses gardes et si elle se méfiait toujours autant de lui.