donc voila on vous a proposé de faire un univers heroic fantasy, voila une des séries qui y seront...
Episode #1
Le noir, le sombre, l’obscur, voila ce que voyait toute la journée, toute la nuit, toutes les secondes l’être enchaîné au mur de la forteresse, si flamboyante à l’extérieur mais si horrible à l’intérieur. Au fin fond du cachot le plus profond des sous sols du duché de Ganya gisait un elfe noir fatigué et pratiquement mort. Non pas qu’il fut blessé ou mourrant. Non. Son cœur, son âme, étaient morts, et cela depuis plusieurs années...humaines, bien entendu.
Il avait été un grand personnage du duché, respecté, aimé, il avait sa légende…mais tout cela était oublié maintenant…il avait tout perdu, mais il ne regrettait rien. Ce qu’il avait fait, il devait le faire. Au moins, cela avait servit à quelque chose, au moins lui seul avait subit les conséquences de ces actes…c’était la seule chose qu’il avait pu faire.
La porte de son cachot humide, sale et sombre s’ouvrit violemment, comme chaque jour. A heure fixe, on lui apportait sa maigre pitance de la journée, composée d’une cruche de vin et d’un petit morceau de pain noir. A peine de quoi survivre jusqu’au lendemain…
Pourtant, ce jour-là, il reçut une bouteille de vin ainsi que deux cuisses de poulet. Que se passait-il donc ? Le Duc avait-il rompu sa promesse et le destinait à la mort ? Ou bien était-ce une simple erreur du garde ? Qu’importe, l’elfe noir était bien décidé à jouir au maximum de ce repas providentiel…
Alors qu’il se jetait comme un affamé (qu’il était) sur le poulet devant le regard plein de pitié et de révulsion du garde, il entendit un autre des maîtres des geôles appeler son compagnon d’une voix pleine d’entrain et de joie, comme si la journée était extraordinaire et magnifique.
« Hey, Bilbo ! Tu as bientôt fini ?
- C’était mon dernier prisonnier, Gar. Il doit être content que le Duc ait décidé de donner un meilleur repas aux prisonniers en ce jour glorieux…
- Parfait ! Nous allons pouvoir être aux premières loges pour la cérémonie ! Je me réjouis de voir cet anniversaire !
- Ça fait combien de temps maintenant qu’ils sont mariés ?
- Je dirais bien une bonne vingtaine d’années…cela fait beaucoup d’années…mais les elfes ne vivent pas comme nous…ils ont de la chance…n’empêche, quel beau couple que Talia et Ezekiel ! Je me demande comment ils ont pu ne pas être ensemble…
- Sûr. Mais n’oublie point de les appeler « Sire » et « Dame », tu sais que le Duc est très pointilleux là-dessus.
- Tu as raison, compagnon ! Allons rire et boire à la santé de ce couple de fer ! »
Le prisonnier n’avait rien manqué de la conversation, et son sang s’était figé quand il avait appris qu’ils étaient mariés…non, cela était impossible. Elle n’aurait point fait cela…et lui non plus. Ils avaient tous deux jurés. Ils avaient jurés de ne jamais faire cela…ils avaient mis leur parole en jeu…ils avaient jurés sur l’honneur…n’avaient-ils donc aucun honneur ? L’avaient-ils oublié dans cette geôle puante et sale ? Avaient-ils seulement pensés qu’ils pouvaient faire cela ?
Au fur et à mesure que ces pensées se bousculaient dans son esprit fatigué et depuis trop absent de la lumière du jour, il recouvrait ses forces. Peu à peu, il sentait de nouveau ses muscles se réveiller. La colère affluait en lui. Le désir de vengeance, le désir de faire payer ce « couple de fer » était trop grand pour que rien ne se passe…
Après avoir terminé de manger son repas, l’elfe noir chercha dans le noir la serrure de sa chaîne. Pendant toutes ces années, il avait lentement mais sûrement observé grâce à la sensibilité de ses doigts les fers qui le retenaient. Il n’avait rien tenté, mais les avait étudiés, plus pour ne pas devenir fou que pour tenter un jour une éventuelle fuite. Mais aujourd’hui, l’évasion était de mise, et toutes ces observations l’aideraient.
Le prisonnier prit entre ses mains, dans l’obscurité la plus totale de ce petit cachot, les deux os de poulet. Lentement, avec une infinie précaution pour ne pas les briser, il commença à crocheter ce qui le retenait prisonnier. Bien que cela fut longtemps qu’il n’ait plus exercé ses talents, l’elfe noir réussit néanmoins après dix minutes à ouvrir sans dommage ses fers. Il était désormais libre de bouger, mais point de sortir. Mais ce n’était qu’une question de minutes, pensa-t-il dans un sourire, sourire que son visage sombre n’avait plus fait depuis au moins vingt ans…
Rapidement, le prisonnier marcha jusqu’à la lourde porte de fer qui le séparait de la lumière. Mais comment faire pour la passer ? Normalement, la plupart des gardes se trouvaient à la cérémonie. Mais il devait au moins en rester un pour le bon fonctionnement des geôles, et pour éviter les évasions…
L’elfe noir frappa plusieurs fois violemment la porte avec ses poings et ses pieds, espérant la venue du garde. Cela se passa quelques minutes plus tard. Tandis qu’il entendait plusieurs jurons familiers, le prisonnier vit la lourde porte de fer s’ouvrir.
Le gardien ne vit d’abord rien que l’obscurité, et le vide. Là où devait normalement se trouver le prisonnier, il n’y avait rien, les chaînes étaient vides. C’était un piège, il le comprit, mais trop tard. Avant qu’il ne puisse faire quelque chose, celui qu’on nommait avant Magnus transperça sa gorge de l’os de poulet, ce qui fit jaillir dans le cachot beaucoup de sang, tandis que le garde tentait d’arrêter le saignement en mettant ses mains sur sa gorge désormais béante. Mais il ne survécut pas, tombant sur le sol en avant, ce qui rentra encore plus l’os de volaille dans la trachée.
Magnus récupéra rapidement ce qu’il pouvait trouver sur le cadavre, c'est-à-dire les clefs des geôles, une dague, une épée moyenne ainsi qu’une cape noire qui pourrait le recouvrir quand il fuirait. Car il était décidé à fuir d’ici après s’être vengé…
L’elfe noir enferma le cadavre dans son ancien cachot, et courut rapidement le long du couloir sombre et malodorant qui constituait les geôles du duché. Il arriva finalement aux escaliers datant de temps anciens, temps où toutes les races vivaient en paix, temps si lointains désormais…
Il arriva, après la montée de ces vieux escaliers de pierre, sur une sorte de grand balcon, donnant sur la place centrale de la forteresse. Il y avait là au moins deux centaines de personnes qui hurlaient, ainsi que plusieurs chevaliers en armures, des troubadours, des saltimbanques. Une grande estrade était placée au centre de la place, et deux sièges trônaient au milieu de cette construction de bois et de tissus précieux. Et dessus, Ezekiel et Talia étaient assis…
La colère monta aux yeux de Magnus quand il vit cela. Il sortit sa dague, et se préparait à la lancer sur l’un des deux époux. Bien sûr, il était loin, mais ses capacités de visées avaient toujours été reconnues comme légendaires.
Il observa Talia. Comment avait-elle osée ? Après tout ce qu’il avait fait pour elle…elle méritait pire que la mort…elle méritait de vivre la même chose que lui…pire encore…mais non, il ne pouvait pas. Pas à elle. Pas à Talia. Pas après ce passé qu’il tentait tant de haïr. Non, il ne pouvait vraiment pas.
Il rangea l’arme, et se prépara à prendre la fuite par une sortie dérobée qu’il connaissait si bien quand il croisa quatre gens d’arme, chacun habillés d’une cape bleue, d’une longue épée, de deux dagues et d’un arc. Leur tunique avait une immense croix blanche au milieu de cet océan de bleu. Les Croisés. Ils existaient toujours…
Alors qu’il voulut passer à côté d’eux comme si de rien n’était, pour ne pas être repéré et éviter un affrontement inutile, l’un d’entre eux observa longuement Magnus, ainsi que sa cape et ses armes. Il prit alors la parole d’un ton surprit et sec, digne de celui qu’avait ses prédécesseurs il y a si longtemps…
« Garneuil ? Est-ce toi ? Tu as grandit !
- Vous vous trompez…
- Non ! Ce sont bien tes armes, et ta cape ! Je les reconnais, nous les avons achetés ensemble ! Mais que fais-tu là ? N’es-tu point assigné aux prisonniers ? »
C’était trop tard, Magnus était découvert. Mais avant qu’il ne puisse faire quelque chose, celui qui avait parlé enleva la capuche de la cape et découvrit les longs cheveux blancs et sales de l’elfe noir. Tous furent choqués de voir qui se cachait sous cette tunique. Tous croyaient qu’il n’était qu’une légende, qu’un conte, qu’une histoire oubliée. Mais ils l’avaient reconnus : c’était bien Magnus, ex Commandant de l’Armée du Duché et fondateur de l’Ordre des Croisés…