Le Rubis.
« On ignore les causes des dégâts, mais selon des témoins, la rue aurait été saccagée par des personnes aux pouvoirs étranges appelées « mutants » »
« Plusieurs passants affirment que l’individu connu sous le nom de Spider man serait apparu hier soir dans les quartiers de Harlem pour empêcher un règlement de compte »
« Recrudescence de personnes appelées justiciers dans les USA. Dernièrement, un héros appelé Gorille serait apparu dans la capitale de Paris »
Incroyable. Tous les journaux parlent d’eux, « les super héros ». Sur chaque chaîne que je zappe, ils les montrent, souvent une photo floue ou un portrait robot mais rien de bien concret. Etrange, cette recrudescence des Justiciers masqués. La population n’en a pas peur, ils voient en eux des héros, capables que du bien. Que j’aimerais être comme ces héros.
Déjà deux mois que je coexiste avec mon alter ego, Hulk, grand monstre tout vert dont le seul objectif est de tout détruire sur son passage. Fort heureusement, j’ai pu le maîtriser, avec l’aide d’Osarias, mon Maître. Une sorte de prêtre lui aussi Elu d’Horus, comme moi. Horus, le Dieu Faucon, oublié depuis des siècles. Les quelques Elus restent sa seul source de foi et d’énergie vitale. J’ai désormais foi en lui, car lui seul pouvait m’aider à me maîtriser et à continuer à vivre. Notamment grâce à son formidable bijou, qui m’a entièrement convaincu. Mon maître me l’avait confié au 5eme jour après notre premier combat.
« Chaque Elu d’Horus en possède un, m’avait il dit. On ne les trouve que dans les roches du désert. Ces rubis rouges sont une sorte de canalyseur du pouvoir d’Horus. Ils permettent à ceux qu’il a choisi de mieux contrôler leurs pouvoirs. J’en ai un semblable sur mon appui. Mets-le et Hulk sera entièrement sous ton contrôle, affirmait-il en me tendant un rubis carré accroché à une chaînette dorée. Et alors que tu déversera de ta force en Hulk, celui ci en déversera aussi en toi.
Sur ces paroles étranges, je glissait le collier à mon cou et le rubis brilla légèrement. Avec, je m’exerçait plus, il brillait intensément à chaque apparition d’Hulk, et je découvrit que cela fonctionnait. Je le sentais plus doux envers moi, plus obéissant, comme une bête féroce qui finissait par être apprivoisée. Je me sentais enfin libre et Hulk ne serait plus un fardeau.
19h30. Vite, Emma ne doit pas attendre. Sortant de mon appartement, je me dirige vers l’arrêt de bus. Pas très classe, mais tout le monde ne peut pas s’offrir une voiture et le vélo est encore plus ringard. Ce dîner en tête à tête, ça fait des jours que je l’attends. On ne s’est pas vu depuis ce qui me semble être une éternité, faute à la recherche d’emploi intensive de la Douce. 15 minutes plus tard, j’arrive enfin, Emma m’attendant en souriant.
Apres un repas fort en mets délicieux comme une pizza à deux et de nombreux baisers partagés, je la raccompagne chez elle à pied, les bus étant retournés à leur gare routière. Elle refuse encore de venir vivre chez moi, « pour ne pas précipiter les choses » Je fais selon sa convenance, elle m’est bien trop précieuse.
La nuit est froide et les lampadaires sont tellement sales que la rue est faiblement éclairée. Emma n’habite fort heureusement pas dans ce quartier, je ne le permettrais pas, mais c’est un passage obligé, et je lui presse la pas, j’ai un mauvais pressentiment.
« Que se passe-t-il Bruce ? Pourquoi aller si vite ? Si tu espères pouvoir passer la nuit dans mon lit, tu peux toujours rêver, je dois me lever tôt demain, sussure-t-elle en se blottissant contre mon épaule.
-Non, c’est pas ça, le quartier est mal fréquenté et les policiers ne patrouillent jamais ici.
-Mais enfin, il n’y a pas âme qui vive.
-C’est bien ce qui m’inquiète, murmurais-je.
Alors que nous passions devant une impasse encore plus obscure que la rue, quatre jeunes sortent de l’ombre et nous appellent. Tout en nous toisant du regard et en souriant, un d’entre eux pose une impressionnante clef anglaise sur son épaule. Un deuxième sors un couteau gravé, un troisième ajuste un poing américain sur la paume de sa main et un quatrième s’approche en rigolant.
« OK, messieurs. Belle prise ce soir. Un gringalet qui sort avec une beauté. Dis moi, ma jolie, serais tu aveugle pour fréquenter une telle merde ?
-Fermez la bande de crétins, rétorque-t-elle.
Bien que l’insulte est assez bizarre venant d’Emma, les braqueurs continuent de rire. Leurs vêtements sont dégoûtants et ils portent de nombreux tatouages et piercings. Les délinquants typiques.
-Bin, dis donc, reprend le quatrième. La meuf protége l’autre con, c’est ça ? C’est vrai que la parité a tendance à pencher de l’autre coté de la balance ces derniers temps.
-Ray, dit l’homme au couteau, braques les et arrête de causer, le p’tit monsieur va faire dessus et on pourra plus récupérer un billet sec.
Ils rirent tous en cœur et Emma sembla esquisser un petit sourire.
-OK, Josh, on va rigoler, reprit Ray en continuant de s’approcher. Le petit monsieur va gentiment nous passer tout ce qui concerne portable, montre, portefeuille etc…
J’aurais aurait voulu me transformer pour réduire ce tas de crétin en merde compacte, mais c’était impossible devant Emma. Je sortit alors mon seul objet de valeur : mon portefeuille, bien qu’il fut déjà bien vidé par le dîner.
-C’est tout ? demanda Ray.
-En même temps, dit celui avec le poing américain, avec sa tête, ça m’étonne qu’une banque accepte de lui donner un billet de 5 dolluches.
De nouveaux rires s’élevèrent, bruyants et aucun habitant ne se montra pour leur prêter main forte. Ils félicitèrent le dénommé Carl de sa blague et Ray se tourna vers Emma.
-Bon, à la demoiselle.
Emma, bien que réticente, accepta enfin de lui donner ses bijoux sans valeur et son portable passé d’un siecle. Mais les autres voleurs ne semblaient pas satisfaits.
-Aaaah, soupira Ray, c’est en dessous de notre quota les mecs. Il va falloir trouver autre chose.
-Pourquoi ne pas demander à la demoiselle un p’tit supplément ? Elle est plutôt bonne, dit le garçon à la clef anglaise.
Une lueur de folie et de désir sembla percer les yeux de Ray et il observa Emma de bas en haut en souriant.
-T’as raison, Charlie, on va s’amuser. Et si elle refuse, on l’y forcera.
C’en était trop, je ne pouvais le permettre, ils allaient la violer sous mes yeux. Je devais appeler Hulk à l’aide. Mais non, je ne pouvais pas, je ne pouvais rien, Hulk pourrais tuer Emma sans s’en rendre compte, je le maîtrise beaucoup moins bien quand je panique.
Emma poussa un cri alors que Josh s’approchait en brandissant son couteau. Je ne pris pas le temps de réfléchir. Pris d’un soudain courage, je m’interposa et d’un direct du droit, je repoussais Ray qui chancela. Les autres m’observèrent avec étonnement, mais ils n’avaient pas peur.
« Chopez le ! cria Ray en se tenant le nez, là où mes phalanges avaient tapé. Chopez le vivant !
Le dénommé Carl se jeta vers moi, le poing clouté brandit. J’ignore comment, mais mes réflexes me dictaient ce que je devais faire. Je para le coup en poussa de ma main gauche son bras et de ma main droite, je frappais sa tempe gauche. Il revint à l’assaut, mais avec un coup de pied direct de face. Je le bloquais et, d’un croche pied, je le faisait tomber et sa tête rencontra à l’asphalte assez violemment.
Je ne me rendit pas compte que le rubis brillait sous ma chemise, mais je sentait la force d’Hulk venir en moi. Josh et Charlie se jetèrent sur moi en même temps. Alors que j’esquivais le couteau de Josh, Charlie ne profita pour me frapper derrière la tête avec sa clef anglaise. Je sentit une douleur atroce derrière le crane mais je ne tomba pas dans les pommes. Au contraire, ma fureur s’intensifia. Josh attaqua, son arme en avant, et en trois coups de poing, il était au sol, la lèvre en sang et l’œil droit gonflé. Charlie se jeta à nouveau sur moi, et son arme s’abattit sur le goudron tandis que je l’évitait. D’une roulade, je récupérais le couteau tombé sur le sol et je le plantais dans sa cuisse jusqu’à la garde, en prenant bien soin de tourner la lame pour que la blessure mette plus de temps à cicatriser. Dans un cri de douleur, Charlie s’affala au sol, les mains crispées sur sa cuisse.
Pendant ce temps, Carl se relevait lentement. La chute l’avait assommé un moment, mais il devait me buter. Il s’approcha alors que j’étais toujours agenouillé au sol, mais, d’un geste ample, je coupais sa joue avec la lame. Carl saignait et je simulais une nouvelle attaque qui l'effraya Carl et lui fit prendre la fuite. Ray, qui n’avait qu’observé depuis le premier coup de poing, était sans arme et vulnérable. Il prit lui aussi la fuite en criant, mais je lançais le couteau dans son épaule gauche afin de le blesser suffisamment pour qu’il comprenne la leçon.
Je n’étais pas du tout essoufflé ni même blessé, et je me retourna vers Emma. Elle s’était écartée du combat et me regardait les yeux ronds. Puis elle se jeta sur moi et me serra fort. Cette étreinte me rassura. Elle n’avait rien.
« Bruce, ça va ? Ta tête, tu n’as rien ?
D’un hochement de tête, je lui fit comprendre que tout allait bien. Les malfrats tentaient de s’échapper, ce qui était assez difficile au vu de leurs blessures. J’allais y retourner mais Emma me retint.
-Ils ont comprit, assura-t-elle.
Nous repartîmes chez elle. Elle me regarde, une lueur de fierté et d’amour dans les yeux. Je ne m’aurais jamais cru d’un tel exploit. Le joyau déversait la force de mon double en moi, je venais de le comprendre, comme je déversais mon contrôle en lui. Je pouvais désormais me défendre, moi qui subissait tant sans rien dire.
Finalement, Emma accepta que j’aille dormir dans son lit, espérant visiblement que je sois aussi doué au combat qu’au lit.