Jour de chance
Les plaines du Dakota du Nord résonnaient encore il y a 150 ans des cris des braves chassant le bison pour nourrir leur peuple et le réchauffer avec les peaux. L’homme blanc n’avait pas tout envahi et la magie des temps anciens existait encore. Les dieux foulaient alors la Terre, bienfaiteurs ou malveillants, jouant à ce grand jeu d’échec qu’est la vie. Les Mandans vivaient dans l’harmonie de ces plaines et vénéraient principalement deux dieux : le dieu Bison représentant la force, la sagesse et la protection, et le dieu Ours, ou esprit Ours, représentant la peur et la colère. L’un était le Bien absolu, l’autre pas vraiment le Mal, les subtilités étaient nombreuses chez les Mandans. Parfois l’esprit Ours apportait la force nécessaire pour vaincre un ennemi ou affronter les rigueur de l’hiver, parfois ils prenaient les braves dans la sombre forêt et apportait des fléaux sur le peuple. Le Shaman Lune-au-milieu-des-étoiles prédit un jour que leur peuple disparaîtrait pour en former un autre, que l’homme blanc les obligerait a ne plus être fier et détruirait la plaine… mais une fille héritière de leurs traditions trouvera le moyen de faire la paix avec l’esprit Ours et en elle la fierté du peuple Mandan renaîtra. Le peuple rie a cette prophétie : parfois le Shaman était un peu fou et tant que le Bison parcourrait les plaines, jamais l’homme blanc ne viendra…
Le combat faisait rage. Danielle ne pensait pas qu’elle rencontrerait autant de résistance… et surtout, elle ne pensait pas qu’elle rencontrerait autant de ces « machins ». Les 10 premiers niveaux avaient été une balade de santé. Quelques scientifiques, beaucoup de personnel administratif… rien de méchant. Dès qu’elle le pouvait, elle ramassait quelques dossier potentiellement intéressant… disons qu’elle se préparait une porte de sortie. Elle le savait, cette intervention non autorisée dans une base gouvernementale secrète ne lui vaudra aucune médaille, bien au contraire !
Les choses se sont corsées à l’entrée du niveau 11 : apparemment anodin, les deux costauds qui entouraient le kidnappeur de Cable les attendaient avec leur mine renfrognée. Morris s’avança un peu, son arme en avant, et lança les sommations usuelles. Pour réponse, il reçu une espèce de laser qui laissa un trou de la taille du Maryland à la place de l’estomac. Morris tomba comme un pantin de chiffon sous le regard éberlué de ses collègues qui purent découvrir le nouvel aspect des deux molosses désormais mi-homme mi-machine : chacun avait un canon à la place du bras gauche, la moitié gauche du visage chargée d’une sorte de viseur, et différent implants au niveau du torse et des jambes. A côté d’eux, Schwarzenegger ressemblait à un meccano mal monté dans Terminator !
Danielle lança un « foutez-moi en l’air ces putains de robots ! » et toute l’équipe balança la sauce dans la tête des deux sentinelles. Ils s’en sortirent pas trop mal cette fois là, seul Johnson s’était pris une prune au bras droit. Danielle inspecta les deux corps décapités de leurs attaquants : c’était pas vraiment des robots, ils saignaient encore… mais pouvait-on encore les considérer comme des humains ?
Irène essayait de coller aux baskets de sa « nouvelle amie », ce qu’elle voyait ne l’enchantait pas vraiment et, du coup, elle ne se sentait plus autant en confiance qu’au début. Toutefois, elle ne perdait pas une miette : sa caméra tournait pratiquement en continu et elle notait un ou deux trucs de temps en temps pour faire son commentaire ultérieurement. « Hey la vieille, fais gaffe à ne pas me filmer, je cherche pas à faire carrière moi…
- Comme vous voulez… euh… au fait, on a pas été présentée…
- Domino, et c’est tout ce que tu sauras ! Toi t’es Irène Merrymachin, la journaliste reine des reportages sur les barbecues !
- Merryweaver…. Vous avez donc vu mon reportage de Memphis Melle… Domino !
- Ouais, et c’est pour ça que j’accepte de te traîner derrière moi, tu m’as permis de retrouver Cable.
- Vous le connai…
- Chut ! Faut que je me concentre ! »
Domino venait de se placer devant une console du poste de garde du deuxième niveau. Elle semblait chercher quelque chose et pianotait sur le clavier. « Qu’est-ce que vous f…
- Là, ça ira plus vite ! »
Juste devant elle, la porte de l’ascenseur venait de s’ouvrir. « Mais comment… l’équipe du FBI n’a pas pu…
- Disons que j’ai de la chance ! »
« Nathan-ami que fais-tu à Je ?
- Je te redonne la capacité de contrôler la moindre parcelle de ton corps… mais chut, c’est assez difficile…
- Nathan-ami veux dire que je pourrais à nouveau changer mon apparence ?
- Oui ! (Nate était agacé par le blabla incessant de Douglock) Mais tais-toi maintenant !
- Je se tait, Je laisse Nathan-ami travailler…
- Douglock !
- Ok… » Voulant montrer qu’il allait se taire, Douglock fit apparaître une fermeture éclair sur sa bouche qui se referma toute seule. Ce geste de métamorphose lui était tellement quotidien auparavant qu’il ne réagit pas tout de suite puis il réalisa qu’il pouvait de nouveau « changer » ! « Humf gneuhum hum !!!
- Qu’il y a-t’il encore, Doug… » Nathan sourit en voyant Douglock avec sa fermeture éclair, le premier sourire esquissé depuis des mois. Même si Douglock l’agaçait, il commençait à l’apprécier, ne serait-ce que pour son don pour la pitrerie. « Maintenant, libère nous, mon ami ! »
Danielle avait trouvé une info sur Cable et son amie… Threnody : ils avaient été enfermés au niveau 27 (mais jusqu’où s’enfonçait cette base… !!). Les pertes étaient lourdes, Danielle avait eu beaucoup de chance et quelques égratignures, les autres étaient soit morts soit blessés, et les deux encore valides l’attendaient sur le palier de l’escalier de secours du dernier niveau. « Agent Moonstar, je crois que nous sommes attendus !
- Combien de Robocops cette fois, Smitters ?
- 10 à première vue…
- Je ne vous retiens pas les gars, vous pouvez allez voir ailleurs…
- On… on reste, on ne vous laisse pas seule ! » Danielle sourit légèrement. Elle n’avait jamais été très populaire mais les quelques personnes qui l’approchaient et découvraient qui elle était vraiment lui restaient fidèles. « merci les gars, je sais pas si je pourrais vous rembourser une telle dette ! »
Smitters donna un grand coup de pied dans la porte et les 3 agents du FBI pénétrèrent dans le couloir du niveau 27 toutes armes dehors, poussant un cri exprimant toute leur rage et leur volonté de s’en sortir. Les Sentinelles qui les attendaient se montraient plus résistantes que les autres, Danielle et les deux agents essayaient de tirer dans leur tête, point faible apparemment, mais en vain, elles se protégeaient mieux. Danielle se fait la réflexion qu’elles s’étaient passé l’info et qu’elles avaient « changé » pour parer cette faille… mais c’était impossible !
Aucun des gardes ne vacillaient… Smitters était déjà à terre, mort, et Danielle venait de se prendre une rafale dans l’épaule gauche. Elle sentait les larmes lui monter aux yeux, comment avait-elle pu se laisser entraîner là-dedans ? Ce Cable en valait-il la peine ? Au moment où elle se faisait ces réflexions, son dernier homme venait de s’écrouler à terre, le visage ressemblant désormais à une étrange bouillie rougeâtre. C’était la fin.
Tout se déroula alors lentement. Elle sortie du creux du mur dans lequel elle s’était dissimulée, pointant ses deux armes vers les Sentinelles et vida ses chargeurs. Elle avait l’impression de pouvoir voir toutes les balles sortirent des canons fumants et suivre leur trajectoire jusqu’à ses assaillants. Elles touchaient toutes leur but mais ne semblaient faire aucun dommage… Puis survient les « clickclick », annonciateurs du vide qui étreignait les chargeurs. Danielle baissa les bras et ferma les yeux. Elle sentit une chaleur étreindre son cœur suivi d’un choc qui la renversa… et tout bascula.
Douglock avait réussi à se fondre dans la porte de la cellule et à en déjouer les sécurités. Il n’arrêtait pas de s’exclamer et de crier sa joie à son « Nathan-ami » qui l’avait libérer des entraves du « professeur ». Nate faisait son possible pour le faire taire, il voulait surprendre Hodge, même si quelque chose lui disait que ce dernier était déjà au courant de ses agissements. Depuis sa « transformations » il devait avoir la possibilité de se lier avec le système et d’être informé des moindres faits et gestes de chacun dans la base. Toutefois, une lueur d’espoir pointait au loin, les bruits provenant d’un autre couloir du niveau devait détourner l’attention de ce cher vieux tas de ferraille. Apparemment un affrontement avait lieu vers l’accès principal du niveau. Nate ne savait pas qui était venu régler son compte à Hodge, mais en tout cas il tombait à pic !
Cela faisait des mois qu’il n’avait pas vu ces couloirs, mais ses souvenirs étaient encore frais et Douglock lui servait de guide. Nate recherchait le laboratoire où il était né, se doutant que Hodge y résiderait. De plus, son nouvel ami lui avait confirmé ses présomptions : « le professeur passe tout son temps dans le labo ». Arrivés devant la porte, Nate fit signe à Douglock de ne plus ouvrir la bouche, celui-ci s’exécutant en faisant disparaître complètement cet orifice. Nate tenta alors un scan psy, histoire de ne pas tomber sur une surprise. Il se concentra énormément afin d’accéder à la pensée mécanique de Hodge, au moins en déceler une petite partie. Du sang commençait à couler de son nez et son bras gauche ondulait bizarrement. Douglock ne pu s’empêcher de s’inquiéter et décida d’arrêter Nate dans ses efforts, toutefois, il avait réussi a déceler une présence à moitié humaine (sans doute une Sentinelle), Hodge et… autre chose. Il décida alors qu’il était temps d’en finir avec ses origines. Changeant son bras gauche en canon, il défonça la porte et tira directement sur la Sentinelle présente aux côtés de Hodge, puis Nate pénétra dans la pièce suivi par la tête de Douglock, étendant son cou afin de laisser son corps en sûreté dans le couloir. Nate ne comprit pas tout de suite ce qu’il voyait mais la surprise suffit à le stopper net. Le laboratoire ressemblait maintenant à une sorte de grotte dont les parois ne seraient pas faites de roche mais d’éléments métalliques en perpétuel mouvement. Au milieu, Hodge formait une grosse boule maintenue au plafond et au sol, d’où sortait sa tête hideuse et ses deux bras, faisant face à un écran où on distinguait les images du combat dont Nate avait entendu les échos. Puis, plus loin, Threnody était comme enlisée dans une des parois, seul son visage était encore apparant. « Thren !…
- Oh non, mon petit, elle va rester là pour le moment.
- Qu’est-ce que tu lui fait, Hodge ?
- J’essaye de la transformer, mais comme je m’en doutais, sa physionomie de mutante rejette encore les implants… mais bientôt elle cèdera, comme j’ai pu faire céder la tienne !
- Pourriture, et tu crois que je vais te laisser faire ?
- Ah, ah, ah ! Pauvre petit Nathan… ou plutôt devrais-je dire Caaaable !! Ah, ah, ah… c’est ridicule comme surnom… Que crois-tu pouvoir faire ici ?
- Je vais te déboulonner ta sale gueule de savant fou !
- Quel jeu de mots ! Mais tu ne pourras rien faire ici, c’est moi qui contrôle tout ! »
A ces mots, sans sourciller, Hodge fit jaillir une tentacule du sol à côté de Nate et la planta dans son bras gauche. « N’oublies pas que c’est moi qui t’ai créé ! » Nate sourit. « Je ne suis plus ton rat de laboratoire, j’ai grandi ! » L’œil gauche de Nate se mit à scintiller d’une lueur blanche qui se propagea à son bras, puis au tentacule, s’étendant lentement à tout le réseau de la pièce. Quand celle-ci atteint Hodge, il se mit à hurler comme si on lui poser un fer rouge sur le corps. « Aaaaargh ! Qu’est-ce que tu me fais ? Comment peux-tu me faire çaaaaaaaaaaargh…
- C’est grâce à toi, sans ton tentacule je n’aurai jamais pu t’atteindre… mon pouvoir psy n’a pas prise sur les machines, en dehors de celles liées à mon corps !
- Noooooooon, non ça ne se peut… arr…01100010…. Arrête ça… 0001010001011…
- C’est trop tard, Hodge, j’ai corrompu ton système. Douglock, sort de la pièce.
- Ok, Nathan-ami.
- Adieu Hodge ! » Nate balança une rafale dans la tête de Hoge qui alla rouler un peu plus loin. Juste à ce moment, l’ensemble de la pièce sembla se liquéfier et tous les éléments qui composaient les murs et le plafond se retrouvèrent à terre. Threnody tomba inanimée au sol, mais saine et sauve.
Danielle était de retour dans son rêve, mais elle n’était pas une petite fille cette fois, elle avait son corps d’adulte. Elle avait déjà quitté la forêt et approchait de la grotte de l’Esprit Ours. Elle savait en elle-même que c’était son épreuve pour rejoindre ses ancêtres dans les grandes prairies éternelles, elle devait affronter sa peur ! La grotte était toujours aussi menaçante, tout comme le grandement qui en sortait. Il approchait, elle le sentait, mais elle ne tremblait pas : elle était prête. L’esprit Ours sorti enfin, il s’approcha d’elle et la frappa avec son énorme patte. Danielle se retrouva à terre, le corps ensanglanté, la douleur était atroce mais, avec de grands efforts, elle releva tout de même la tête pour regarder l’Esprit dans les yeux. « Fille du peuple Mandans, en toi vit la fierté de ton peuple, tu le montres en cet instant. Ton heure n’est pas encore venue, mais ton destin s’ouvre enfin à toi, tu as su surmonter ta peur. Désormais, tu te serviras de celle des autres pour rétablir ce qui doit être.
- Je… je ne comprends pas…
- C’est ainsi ! » L’esprit Ours fonça alors sur elle, se transformant petit à petit en fumée qui investit le corps de Danielle.
Les Sentinelles avançaient vers le corps qu’elles venaient d’abattre. Leurs capteurs indiquaient que ses signes vitaux reprenaient de l’essor, elles devaient donc l’exterminer ! Au moment où elles armaient leur laser, l’ascenseur émit un « ding » et les portes s’ouvrirent. « Salut les mecs, j’arrive un peu tard pour la fête mais j’ai ramené mon invitation ! » Domino pointa ses deux canons vers les Sentinelles et commença à tirer, visant juste à chaque fois, et diminuant le nombre de ses ennemis de moitié. Toutefois, les chargeurs se retrouvèrent vides et ce fût au tour de Domino de subir les rafales de tir. Par chance, elle était souple et agile et elle arriva à esquiver la plupart des lasers, sauf un qui toucha sa cheville gauche et l’immobilisa à terre. Les 5 dernières Sentinelles s’approchèrent d’elle et s’apprêtaient à tirer. Soudain, une espèce d’image vague apparue devant elles, Domino ne voyait pas bien ce que cela représentait mais elle remarqua que la partie humaine du visage des Sentinelles se crispait sous l’effet d’une peur atroce. La panique se fit sentir et le côté « machine » et logique de celles-ci ne pu contenir un tel flot de perturbations, grillant instantanément leur cerveau. Les 5 soldats s’écroulèrent, laissant place à Danielle, pas franchement plus fraîche que ceux qu’elle venait d’éliminer. « Waouh, je sais pas comment tu as fait ça mais je te tire mon chapeau !
- je leur ai… simplement… fait peur…
- Agent Moonstar… Danielle, ça va ? (Irène venait de surgir de l’ascenseur après avoir vérifié que tout était bien enregistré)
- Irène… oui… ça va… un peu fatiguée c’est tout….
- Bonjour, nouveaux amis de Je ! Vous êtes venus pour Nathan-ami aussi ?
- C’est quoi ce truc encore ?
- Du calme, il est avec moi ! (Nate, supportant Threnody, et Douglock venaient d’entrer dans le couloir) Madame Merryweaver ! Je ne sais pas si je peux dire que je suis content de vous revoir… Et vous, Agent Moonstar, on se rencontre enfin !
- Vous saviez… ?
- Je suis télépathe, difficile de me suivre discrètement ! Et toi, qui t’es ?
- Bé… euh, on m’appelle Domino, je te cherchais.
- Bien tu m’as trouvé… maintenant, qu’est-ce que je vais faire de vous tous ? »