Un nouveau départ.
San Francisco.
Ville américaine située sur la Côte Ouest, qui fait concurrence à Los Angeles.
Ville américaine connue dans le monde entier pour son fameux pont, le Golden Gate.
Pourtant, tout différencie ces deux grandes villes américaines situées à quelques kilomètres l’une de l’autre : San Francisco est la capitale de la diversité, de la tolérance, des races multiples, alors que Los Angeles traîne une réputation d’élitisme et de bizarrerie. Mais ce n’est pas ainsi à San Francisco.
Des milliers de personnes y viennent chaque année chercher une vie meilleure, un espoir dans l’océan de pauvreté et de désespoir dans lequel ils vivaient. Bien sûr, peu arrivent à s’en sortir et les exemples de déchéance sont malheureusement nombreux. Mais certains y arrivent. Ils arrivent à passer outre leurs différences et à vivre normalement. C’était tout ce que désirait le conducteur de la vieille Mustang qui zigzaguait dans les rues de la cité, à la recherche de l’appartement qui deviendrait sous peu son chez lui.
Cela faisait des semaines que Bruce Banner avait disparut de la Californie. Evidemment, il devait être recherché maintenant. Par la police, par ce qui lui restait de famille, par Emma…il n’aurait pas dû partir, il le savait. Mais l’ancien chercheur ne pouvait continuer à vivre dans cette ville, avec ces personnes, après tout ce qui était arrivé…et surtout, il n’avait pas osé y revenir. Avec la destruction du Temple en Egypte, il ne pouvait revoir ces lieux qui lui rappelaient tant ce qu’il avait fait et cette dernière entrevue avec Osarias et Matrias…
Sa vie avait changée, avait été piétinée et pendant des journées entières, il n’avait pas su quoi faire de son existence, tentant de trouver un moyen de rentrer en Amérique. Maintenant qu’il était rentré à bord d’un cargo, et qu’il avait décidé de retenter de vivre dans le monde, il devait changer d’air. Changer de vie. Changer lui-même, au fond.
C’était pour cela qu’il était venu à San Francisco.
Mettre tout le pays entre lui et son passé était une bonne idée, mais il avait toujours en lui ces terribles cauchemars qui le harcelaient, et lui rappelaient ce qu’il avait au fond de lui…Hulk. Cette créature d’horreur et de monstruosité qui avait été la cause de tout. Sa malédiction, en fait. Son « don d’Horus » selon Osarias et Matrias, même si maintenant l’ancien chercheur doutait de plus en plus de la véracité de ces propos…
Après tout, avait-il pensé, et si il n’avait que manipulé par des fous ? Cette pensée le terrifiait…
Banner soupira en se garant devant un immeuble de trois étages à l’Ouest de San Francisco. Pourquoi toutes ses pensées le ramenaient-elles toujours à la créature qui vivait au fond de lui, et ne demandait qu’à survivre ? Cela faisait des semaines que ce monstre n’était plus apparut…Peut-être que l’affrontement avec Osarias et Matrias avait définitivement enfermé Hulk en lui…peut-être que la mort de son ancien Maître avait fait taire la Créature à jamais…mais Bruce n’y croyait pas.
Il savait que cette chose serait son lot jusqu’à la fin de son existence, et il avait même hésité à y mettre fin ou non…Après tout, avait-il pensé, Hulk était trop dangereux pour survivre dans ce monde, et il n’avait plus rien pour le rattacher à la vie…pourquoi ne pas mettre fin à son existence, dans ce cas-là ? Pourquoi ne pas en finir avec tout cela ?
Même si les pensées de Bruce l’avaient amenées à cela, il n’avait pas eu le courage de presser la détente du pistolet qui était toujours caché dans un de ses cartons et qu’il avait acheté sous un faux nom dans une boutique peu recommandable de New York, à son arrivée du Caire. Evidemment, il se doutait bien que cette arme le pousserait encore à ce genre de considérations, mais au fond de lui, il caressait l’espoir d’avoir le courage, un jour, de mettre fin à sa vie…
Mais Banner chassa ces pensées de son esprit en entrant dans l’immeuble. Il avait autre chose à faire, maintenant, plutôt que de ressasser des pensées sombres et suicidaires qui lui reviendraient bien assez vite le soir même, quand il serait seul au fond de son lit dans l’obscurité. En soupirant, l’ancien chercheur alla vers la concierge, espérant pouvoir rapidement aller s’enfermer dans sa chambre et boire un peu de l’alcool qu’il avait dans ses cartons.
« Madame ? »
La femme était grosse, laide et sentait l’urine de chat. Elle avait deux immenses verrues sur sa joue droite, et ses cheveux blonds étaient coiffés dans un chignon qui avait été à la mode dans les années 50. Elle portait un tablier de cuisine sur ce qui semblait avoir été une longue veste de pyjama pour femme, mais dans une autre vie…
Lorsque Bruce lui avait parlée, elle avait mit quelques instants à tourner son regard de la télévision (et d’un stupide feuilleton en espagnol) pour le jeter vers le nouvel arrivant, l’air de ceux qui sont dérangés dans leur seul instant de bonheur de la journée sur le visage.
« C’est mademoiselle. Et ouais ?
- Désolé. Je m’appelle Bruce Samson et…
- C’est quôa c’nom ? Z’êtes pas d’ici, nan ? »
Son haleine de chacal n’avait d’égal que sa laideur, et Bruce dû faire un immense effort de volonté pour ne pas vomir sur cette monstruosité qui avait due être il y a longtemps une femme. Il tenta alors un sourire, mais seul un rictus étrange s’afficha sur son visage.
« Euh…non. Je viens de la Côte Est.
- Ah…l’tarés, ouais…Bon, qu’est’c’qu’j’peux faire pour vous ?
- Je loue un appartement, dans cet immeuble. Je viens chercher la clef.
- Ah ouais ?
- Oui.
- Quel nom ?
- Samson. S, A, M, S, O, N. Samson. »
Bruce soupira alors.
Son premier réflexe eut été de dire Banner, mais il ne le pouvait plus. Même si il n’était pas réellement recherché, enfin peut-être pas, l’ancien chercheur avait décidé de tout faire pour brouiller ses pistes. D’où ce changement de nom, et son changement physique.
Car oui, il avait changé. Celui qui détenait en lui Hulk avait maintenant une barbe de quelques jours en permanence, se la rasant régulièrement assez pour qu’elle ait toujours la même longueur. Ses cheveux avaient légèrement poussés, et il les avait teints en blond pour ne pas se faire reconnaître, même si il avait du mal à s’y faire. De même, Bruce portait maintenant des lentilles de contact qui lui faisaient de très beaux yeux bleus.
Ainsi, même Emma et Matrias auraient eus du mal à le reconnaître. Et c’était ce qu’il désirait.
Après quelques instants, l’énorme femme avait terminée de chercher dans ses dossiers, c'est-à-dire un amoncellement de paperasse autour d’elle. Elle leva une tête ornée d’un sourire monstrueux, et Bruce sentit de nouveau son haleine fétide sur son visage. Il se retint encore plus difficilement de ne pas recracher ce qu’il restait du hot dog qu’il avait prit sur la route.
« Ah ouais…je vois. C’l’5C.
- Et où se trouve-t-il ?
- Troisième étage, pis après c’marqué d’ssus. J’viendrais plus tard pour voir si ç’vous va. »
A peine avait-elle posée les deux clefs (une originale et un double) qu’elle se retourna totalement pour voir son feuilleton à la télé. Bruce ne perdit pas de temps alors, et prit les deux sésames pour son futur chez lui et monta rapidement : rien que d’être en présence de cette horreur humaine lui donnait la nausée…
Après avoir monté les marches menant au troisième étage, Banner y arriva finalement. Comme il s’y attendait, cela n’avait rien de propre, mais il n’y avait pas de rats ou d’insectes visibles. Même si cela ne voulait rien dire, c’était déjà ça…
L’ancien chercheur s’arrêta devant la porte du 5C, le dernier appartement de l’étage, et rentra la première clef dans la serrure. Il essaya de l’ouvrir, mais il remarqua que celle-ci était déjà ouverte. Rapidement, Bruce entra dans son nouvel appartement et le referma à clef, avant d’observer sa nouvelle antre.
Même si il savait que cela n’allait pas être le grand luxe, le nouvel habitant des lieux fut quand même déçu. Trois pièces (chambre/salon, cuisine, salle de bains), un vague balcon, et quelques pauvres meubles qui avaient vus des jours meilleurs dans quelques vies précédentes…voila ce qui était désormais son lot quotidien.
En soupirant, Banner commença sa visite des lieux, et eut la désagréable surprise de découvrir que l’électricité ne marchait pas, et que seule l’eau froide était disponible. Même si il n’était plus vraiment douillet, se doucher tous les jours à froid au réveil n’allait pas être le meilleur moment de la journée…
L’ancien chercheur trouva aussi des ustensiles de cuisines dignes d’un film d’horreur de mauvaise facture, et soupira encore plus en entendant les ébats assez passionnés de ses voisins, qui faisaient trembler ses murs. Ou il s’agissait d’un jeune couple amoureux, ou d’une prostituée, ou d’une garçonnière. Dans tous les cas, Bruce n’allait certainement pas dormir tranquillement, ce qui ne le dérangeait pas vraiment, vu ses cauchemars lorsqu’il entrait dans le Royaume des Songes.
En plus, avec certainement les autres cas qui devaient être ces voisins et qu’il avait entraperçut autour de l’immeuble, l’ancien chercheur ne manquerait pas de distraction. Evidemment, il aurait préféré autre chose qu’une bande de tarés asociaux pour se distraire…
Celui qui se faisait désormais appeler Samson, en référence à un de ses professeurs d’université, s’approcha alors de la fenêtre, et regarda la ville. Peu de buildings étaient visibles dans San Francisco, et la ville semblait s’étendre à perte de vue.
Il sourit alors. Si des centaines d’immigrants pouvaient espérer trouver un avenir meilleur ici, pourquoi lui ne le pouvait-il pas non plus ? Il avait assez payé pour sa malédiction…
Banner resta encore quelques instants à rêver devant le paysage de la ville, puis alla chercher un journal pour se chercher du travail, ce qui n’était pas vraiment facile avec une fausse identité, pas de vrais papiers et un monstre assoiffé de destruction en lui…
Au centre de San Francisco, l’inspecteur Talbot fumait tranquillement sa cigarette, les yeux braqués sur la vitrine d’un bijoutier. Cela faisait cinq ans aujourd’hui que lui et sa femme Betty s’étaient unis devant le Prêtre, dans un jardin autour de la ville par une belle journée ensoleillée. Bien sûr, tout n’était plus aussi rose qu’à l’époque, mais Glenn avait dans l’intention de faire en sorte que cela redevienne comme avant.
Evidemment, Betty ne lui pardonnerait pas si facilement ses adultères, mais peut-être qu’un beau bijou, un dîner romantique, des fleurs et une attitude convenable la ferait légèrement fléchir. Et peut-être qu’il pourrait dormir dans leur lit, et plus sur leur canapé, comme depuis trois mois…
Oui…ça pouvait marcher…
L’inspecteur de police sourit alors, écrasa sa cigarette et rentra dans la boutique.