« Les Dix Commandements ?
- Oui, Inspecteur Gordon. Les fameux Dix Commandements. »
James Gordon ne comprenait pas grand-chose. Il avait confiance dans cet homme étrange et ténébreux devant lui, mais ce qu’il disait n’avait pas vraiment de sens…sauf pour lui, apparemment. En tout cas, Batman allait devoir s’expliquer, surtout si il avait enfin trouvé le mobile de ce fou qu’ils devaient arrêter.
« Mais…mais comment cela ? Ce n’est pas logique…
- Au contraire, Inspecteur, au contraire…rappelez-vous que chaque meurtre avait un chiffre romain peint en sang…cela renvoyait à chaque Commandement bafoué par la victime selon le tueur. Ainsi, il semble vouloir envoyer un message au Dieu des Chrétiens ou à quelqu’un…je ne sais pas encore qui.
- Mais…mais…pourquoi ? C’est…c’est si…
- Impossible ? Fou ? Improbable ? Oui, et pourtant cela existe. Mais je n’ai pas le temps de vous expliquer plus en détail. Je dois trouver la prochaine victime avant que le tueur ne la chasse et ne la tue. Je suis sûr qu’il a déjà tout programmé.
- Comment allez-vous faire ?
- Je me débrouillerais. Derrière vous, il y quelque chose qui pourrait vous aider à comprendre pour les meurtres.
- Hein ? De quoi vous parlez ? »
Gordon, toujours surprit et stupéfait par ce que venait de lui dire ce Batman qui semblait tout savoir et tout contrôlé, se retourna et trouva une Bible assez neuve, avec un petit signet à la page des Dix Commandements rapportés par Moïse. L’inspecteur regarda quelques instants les dix choses que les Chrétiens ne devaient pas faire, avant de se retourner vers celui qui lui avait apporté cela.
« Et je… »
Mais le policier ne finit pas sa phrase. Son « collègue » avait déjà disparut comme il était venu. Gordon soupira et décida d’aller étudier l’affaire selon cette nouvelle vision offerte par Batman, cette nouvelle vision qui lui permettrait peut-être d’arrêter ce fou qui l’empêchait de dormir chaque nuit, malgré les massages apaisants de Barbara…
Il était rentré dans son antre aussi vite que possible. Il s’était faufilé avec sa moto dans le bois derrière chez lui. Ainsi personne ne remarquait ses sorties nocturnes. Et personne ne voyait Batman sortir de la maison de Bruce Wayne. Il avait garé la moto et il s’acharnait à trouver la future victime sur son ordinateur. Et avec le futur commandement, les brebis sacrificielles ne manquaient pas. « Tu ne Tueras point. » Vaste programme…
Il faut comprendre comment le tueur choisit ses victimes. Il faut reprendre tout depuis le début. La nuit été déjà avancée, mais il savait qu’il n’avait pas beaucoup de temps. Son cerveau fonctionnait au ralenti, voilà plusieurs nuits qu’il passe dehors et que la journée il doit encore bosser. La lumière de l’ordinateur l’insupporte, ses yeux lui piquent…
« Concentre toi Bruce… Concentre toi… »
Dehors un malade sélectionne une nouvelle victime, un innocent doit-il payer ton incompétence, Batman ? Alors épluche tous les fichiers de la police, passe en revue les profils psychologiques de l’asile. Trouve le schéma, trouve la méthode tu tiendras le tueur…
Bien Rashi Thalwegeri, la première victime…
…morte parce qu’il avait violé le fameux « Tu n'auras pas d'autres dieux devant ma face », le premier des Dix Commandements. Gordon regarda alors le dossier du musulman mort…enfin, un des musulmans morts…il avait été retrouvé devant une Eglise, lui aussi…mais pourquoi ? Et surtout, pourquoi avec le visage arraché ?
« Soit pas débile, James…le visage détruit, c’est pour la face, mais le reste… »
Gordon plongea sa moustache naissante dans le café presque froid posé sur son bureau. Mmh, ça faisait bizarre, cette sensation de poils longs sur le visage, pensa-t-il en regardant encore les photos morbides du mort…peut-être qu’il garderait cela si il gérait cette crise…mais l’inspecteur stoppa ses pensées pour se replonger dans l’affaire.
Rashi Thalwegeri…musulman pas vraiment pratiquant, mort avec le visage arraché…à cause de « Tu n'auras pas d'autres dieux devant ma face »…en clair, il n’y avait aucun lien entre cet homme et le commandement…Rashi était un mec normal de Chicago qui tentait de gagner sa croûte comme il pouvait…comme tout le monde…et même si son boulot était pas génial, il…
« Une minute…c’est quoi son boulot, de nouveau… »
James regarda dans le dossier : marchand ambulant. Marchand ambulant d’icônes religieuses chrétiennes, juives, musulmanes, bouddhistes et même les soi-disant porte bonheur…il vendait tout ça près des Eglises et des quartiers religieux…devant les Eglises, en fait…
« Bingo… »
Un sourire se dessina sur le visage fatigué du flic : il venait de comprendre. Le tueur avait tué Rashi parce qu’il exhibait devant les Eglises de la ville les images d’autres Dieux sans respect pour aucun…et pour avoir montré à la face de Dieu ces icônes, il avait eu le visage arraché…
« Ok…passons au prochain…Ahmed Yalabar…celui du Deuxième Commandement… »
… « Tu ne te feras point d'image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre »…voila ce qu’était la Deuxième Loi Divine…le tueur avait longuement observé Ahmed avant de l’attaquer ce soir-là pour lui faire avaler toute sa marchandise d’icônes musulmanes et de représentations du Prophète et du Coran…encore une fois, un musulman…
Batman était toujours penché sur les photographies et analyses devant lui, un vague sandwich préparé par Alfred entamé à ses côtés. Il avait déjà découvert que l’assassin avait eu Rashi en l’attrapant la nuit alors qu’il rentrait chez lui…ce devait être la même chose pour Ahmed…mais comment connaissait-il ces être ?
« Ne soit pas stupide. Le commerce de Rashi se trouve à quelques mètres à peine du quartier catholique. Et Rashi faisait souvent des rondes là-bas… »
Parler tout seul était souvent signe de folie, mais cela aidait étrangement l’homme qui surveillait la ville à ne pas sombrer dans cette folie, en fait. Mais même s’il savait comment le tueur avait eu ces deux hommes, Batman ne savait toujours pas quel était le lien avec les autres et comment il les connaissait…peut-être qu’en se penchant sur la troisième victime, le fameux…
Mike Joharty, le joueur de foot, trop mégalo ça la tué. James était allé à un de ses matchs avec Barbara, et ce mec était exceptionnel, mais il se la jouait trop. L’inspecteur avait toujours pensé qu’il fallait rester humble en toute circonstance…
Mike donc, tué pour le tatouage dans son dos « God » et sa réputation de joueur divin, bon là c’est clair…
Il reste donc deux. La fille…Helena machin, pensa-t-il…tuée dans sa librairie…fille de pasteur…pourquoi ? « Souviens-toi du jour du repos, pour le sanctifier » bien sûr…elle bossait le dimanche…et n’était pas très loin d’une église…ce salaud devait l’avoir vue ouverte en sortant de la messe…ce fils de pute allait à toutes les églises, peut-être…
Enfin, il restait…l’autre. Le gamin…massacré. L’horreur. Jim a la nausée rien que de s’en rappeler…même Batman n’a pas bien supporter cette vision horrible, c’est dire…Là aussi, malheureusement, la liaison est facile…le gamin avait tué un homme d’église qui l’avait abusé…et il venait à peine de sortir de taule…pourquoi ? Pourquoi le tuer ?
« Honore ton père et ta mère, afin que tes jours se prolongent dans le pays que l'Éternel, ton Dieu, te donne », dit le Cinquième Commandement…mmh…ses parents n’avaient rien voulus dire à la police, à l’époque…oui, c’est cela…ils avaient voulus étouffer l’affaire, et le gamin était allé outre…c’était à cause de cela…
Gordon sourit enfin. Il avait tout comprit, et commençait même à voir comment ce fou fonctionnait. Maintenant, il fallait savoir qui était la prochaine victime…
Putain ! Mais ça sert à rien ça ! Ce n’est pas ça qu’il faut rechercher. Il faut ne pas chercher dans le passé, mais bien la future victime, se fustige Gordon. « Tu ne tueras point » il va s’attaquer au plus grand tueur de la région ou en tout cas le plus connu… pour que l’impact soit plus fort… mais qui est-ce ? Qui peut bien être le grand tueur de Chicago ? Et ce dans une optique religieuse, bien sûr…
Tueur… le plus grand tueur… son cerveau fonctionnait au ralenti, les pensées s’entrechoquaient dans sa tête. Il n’arrivait même plus à retenir ses paupières. Alfred était déjà parti se coucher dans la chambre d’ami. Et lui il luttait contre le sommeil, son esprit s’évadait… il se revoit parler à Harvey Dent. Il rit, mais que dit-il ? Il parle de lui, d’un article d’un journaliste remonté…
« Tueur… Tu entends, Bruce ? Moi, un tueur… »
Tueur ? Il rit, les mots ne lui parviennent pas, il parle de tueur, que…qu’il est un tueur !
Mais oui !!! L’adrénaline s’injecte avec force dans son sang, il faut qu’il se dépêche avant qu’il y ait un nouveau mort…