Voilà une semaine que je me terre dans le fond de mon lit. Je ne veux plus sortir, je ne veux plus vivre… le problème c’est que je ne peux pas me suicider, ça m’est impossible. Alors je me soustrais au monde, je me coupe de tout. Voilà une semaine que j’ai tué une trentaine de personne. Je n’ai rien fait, j’ai trop hésité et au moment où j’en ai eu envie, c’était trop tard.
Il existe une différence entre être passif, regarder les émeutes à la télé, se sentir coupable de ne rien faire avec ses pouvoirs et ne plus entendre 30 cœurs battre devant soi. Et j’en fait la douloureuse expérience. Je me dégoûte, je me hais. Je ne mange plus, je ne bois plus. Je ne bouge même plus. Je reste là comme un mort sur mon lit. J’ai peur de revivre ce genre de scène si je sors. J’essaye de ne pas entendre le monde vivre et souffrir dehors. Je ne peux pas supporter le poids des vies, le poids de mes responsabilités.
Soudain mon téléphone sonne une fois de plus. Les 8 sonneries retentissent dans un silence indifférent. Mon répondeur se met en route et je peux entendre Loïs demander pourquoi je ne réponds pas, pourquoi je ne suis pas venu au rendez vous, si je vais bien, qu’elle essaiera de passer ce soir… blabla…
Je me surprends à prier pour que ça soit des paroles en l’air. Qu’elle ne vienne jamais, qu’elle ne me voit plus. Comment la regarder une fois de plus dans les yeux ?
Encore la sonnerie du téléphone. Encore mon message de répondeur. Je n’ai même pas la volonté de me lever pour tout débrancher. Je pense que Loïs insiste beaucoup… mais la voix me donne des frissons. C’est l’homme qui m’a posé toutes ses questions juste avant l’incident. Il parle lentement, insiste sur chaque syllabe. Chaque lettres s‘enfoncent dans mon esprit comme des aiguilles.
« Que vas-tu faire maintenant ? Pour vivre heureux vivons cachés ? Tu n’étais pas prêt, mais maintenant oui, alors pourquoi faire le mort ? Réveille toi… »
Le bip m’arrache à mes réflexions. Je suis perdu, j’ai échoué, il y a eu des morts bon sang ! Les gens normaux ne doivent pas souffrir de ma présence. Mais je sais que je peux faire changer des choses. Quoi, sauver un gosse, arrêter les méchants ? Je sais que ça ne sert à rien. Les enflures, les vrais, les gros caïds, les mecs qui ont de l’argent et qu’importe leurs crimes sont relâchés par des avocats. Vous avez déjà pensé enfants que la vérité, la justice, l’amour étaient des valeurs nobles ? Il fallait se battre pour elles ? Vous savez, moi aussi, il fut un temps où c’était presque mon leitmotiv … Je me disais que mes pouvoirs pouvait faire quelque chose, que ce qui me différenciait, pouvait faire la différence dans ce monde. Alors j’ai essayé d’arrêter cette prise d’otage dans la bibliothèque. Ils ont fait un véritable massacre, des enfants, des mères, des innocents ont été criblé de balles pour rien. Et moi où j’étais me direz-vous ? Dans la rue d’à côté en pleine crise de folie. Je ne me rappelle plus bien, mais je m’étais élancé à mach 3 vers la bibliothèque et lorsque j’ai repris conscience j’avais les larmes aux yeux, la bave aux lèvres et le crane prêt à exploser. Les murs autour de moi étaient ravagés.
J’ai le corps le plus puissant de l’univers, mais quelque chose chez moi ne tourne pas rond. J’ai si peur de me servir et de mes pouvoirs et de redevenir fou. J’ai peur de tuer de mes propres mains. Mais regarder les gens mourir devant moi, les voir se débattre dans les emmerdes jusqu’à ce qu’ils en crèvent ne me plait pas. Et depuis ce coup de fil je ne sais même plus ce que je dois penser. Bon sang ! J’aimerez volez au-dessus de la ville dans un uniforme rouge et bleu, faire régner la paix et la justice, servir d’exemple au monde entier. Mais à chaque fois je me vois au milieu d’une banlieue détruite, les corps de milliers d’innocents à côté de moi sans que je sache pourquoi, sans que je sache quel sang coule entre mes doigts, pourquoi les murs sont coupés au laser et certains corps complètement givrés. Car j’en suis capable, je suis même capable de détruire le monde en un souffle. Il me suffirait de le vouloir et six milliards de vies s’arrêteraient. Comme ça, le temps d’un claquement de doigts.
Alors pour éviter ça je me terre chez moi, dans mon lit sans bouger, évitant même de respirer car mon pire cauchemar s’est réalisé. Je ne sais pas combien de temps je vais mettre à digérer ça. Je me demande si je vais y arriver.
« Que vas-tu faire maintenant ? Pour vivre heureux vivons caché ? Tu n’étais pas prêt, mais maintenant oui, alors pourquoi faire le mort ? Réveille toi… »
Pourquoi ces mots me tourmentes, pourquoi cette voix erre dans ma tête comme un chien qui mordrait le vide sans arrêt ? Pourquoi ce fou me pose toutes ses questions ? Il me pense capable, il pense que je peux changer le monde je suppose. Mais je pense qu’il ignore de quoi sont fait les héros. Pas de super pouvoirs, de cape, d’emblème ou de surnom ridicule. Pour moi ce n’est pas ça. Je respecte les autres, qui se battent pour une cause juste. Mais je sais qu’ils le font aussi car ils aiment ça, ils ne pourraient pas raccrocher, ils ne pourraient pas se passer de l’adrénaline, des yeux débordants de remerciements. De la joie simple que l’on éprouve lorsqu’on accomplit quelque chose de bien. Pour moi un héros c’est différents. C’est quelqu’un qui agit pour le bien certes, mais qui le fait anonymement. Je parle du flic qui patrouille, du boulanger qui donne à bouffer aux sans abris, des médecins dans les pays pauvres. Des pompiers, ambulancier, bénévoles, assistantes sociales etc…
Je ne peux pas me mesurer à leurs dévouements, je suis peut-être capable de grande chose, mais je refuse de les faire. Car j’ai peur des conséquences, j’ai peur de mal faire. Je suis l’arme ultime de ce monde, ms actions auront des répercussions immenses si j’agis. Et si je me trompe ? Et si je faillis ? Chaque jour lorsque je me rase, et que je croise mon propre regard dans la glace je me pose la question. Combien de vies j’aurais sauvées ? Et combien j’aurais détruites ? Car cette équation résume ma vie entière. Si je commence à aider des gens je ne pourrais pas me limiter à un quartier, une ville ou même un pays. Non mes pouvoirs me permettent de sauver le monde entier. Mais si je sauve le futur Hitler ? Ou que mes actes rendent fou un homme assez puissant, un homme assez fou pour sacrifier des vies pour m’atteindre ? Je sais que la vie ce n’est pas comme dans les vieux comics que je lisais. Que le méchant ne dévoile pas son plan, qu’il ne capture pas la belle du héros. Non les méchants dans ce monde envoi des milliers d’homme se faire tuer ou tuer des innocents pour une raison futile. On l’a déjà vu et on le voit encore. Je devrais faire quoi, destituer Bush, prendre sa place ? Prendre la direction du monde ? Faire régner une utopie sur cette planète ? En quoi serais-je meilleur que les autres, en quoi serais-je plus capable, moins faillible ? Car mes pouvoirs d’où qu’ils viennent, ne me rendent en rien moins prédisposé à l’échec, sauf que les miens seraient plus visible. C’est toute l’ironie de ma situations je crois.
J’ai ces dons mais pas la carrure, je suis une boite de pandore réincarnée, mais cette fois la boite désire rester fermée. Puis des coups frappent contre ma porte. De tout petits coups, donnés par une main tout petite.
- Clark ? Il y a quelqu’un ?
Lois. Me sang se fige, que dois-je faire ? J’entends la porte s’ouvrir, quel con ! Je n’ai même pas pensé à la fermer en rentrant de cette nuit horrible. La lumière du soleil pénètre mon salon, j’entends ses pas résonner sur mon parquet.
- Clark ?
Sa présence m’affole, je me lève, et me dirige vers elle. Mon dieu que dois-je faire ?
- Oui, ici… Bonjour Lois…
Elle marque un temps d’arrêt, me fixe. Son regard exprime la surprise, ses pupilles s’écarquillent un instant puis c’est finit. Elle recompose son masque de journaliste acharné, de travailleuse exemplaire.
- Que s’est-il passé Clark ? Pourquoi ? …
- C’est compliqué et… je n’ai pas envie d’en parler…
- Je vois… vous comptez revenir au journal ? le nouveau patron ne va pas tarder et…
Je m’en fous. Dieu le père pourrait venir que je m’en foutrais. Mais je ne peux pas rester dans cette condition non plus. Je ne peux pas passer mon temps à me remémorer toute ma vie et me demander ce que j’aurais du faire…
Réveille toi…
Oui je vais me réveiller, non comme l’égal d’un dieu, comme un héros, mais comme un homme simple qui va au boulot après une dépression. Mon choix est fait je continuerai à ne rien faire… je me sens débarrassé d’un poids, je me sens libre enfin. Il fallait que je fasse un choix et une fois celui-ci pris je pense pouvoir vivre avec…
- Comment s’appelle le nouveau boss ?
- Lex, Lex Luthor.