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| Episode 1/12 | |
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La Rédac' Rédacteur
Nombre de messages : 1491 Date d'inscription : 02/12/2004
| Sujet: Episode 1/12 Mar 12 Aoû - 21:09 | |
| Adrian Chase contemplait son café, rempli à ras bord. Entre ses doigts, une cigarette se consumait. C’était sa première sortie en ville depuis son licenciement pour faute grave. La marque du nouveau capitaine, Nicholas Galtry, avait comme était déposé sur son derrière, au fer rouge. Faute grave. Ces mots dansaient sans cesse dans sa tête. Qu’est-ce que cette ordure y connaissait en faute ? Il avait suivi une brillante carrière dans l’administration policière, sans jamais avoir fréquenté le terrain. Hank Hall, évincé par le nouveau maire, avait un caractère bien trempé et des positions plutôt douteuses mais, lui au moins, était un bon flic, à même de juger qui dans son équipe était défaillant ou non. Il détestait Adrian et c’était une haine réciproque, mais Hall connaissait son parcours et ses exploits. Il était un inspecteur de choc très utile lorsque les affres de la procédure retardaient une enquête. Chase était la dynamite qui faisait avancer l’affaire et son impulsivité, bien connue dans le service, avait servi San Francisco bon nombre de fois.
Mais le grand nettoyage de printemps avait balayé tout ça et décimé les rangs de la police. Chase en était une des victimes, et c’était prévisible. La faute grave en question avait été une arrestation un peu musclée ou le suspect avait eu un nez cassé. La suspension s’était immédiatement commuée en démission forcée que Chase s’était refusé à signer. Finalement, ce fut devant les tribunaux que le licenciement de l’inspecteur avait été officialisé, sous les applaudissements des jurés. Le procès avait fais grand bruit, Galtry s’en servant pour annoncer son vaste programme d’épuration, sous les sourires entendus et les acquiescements des journalistes et de la plupart des citoyens. Les bavures de ces dernières années, sous l’administration Ross, lui aussi déboulonné par feu Joey Wilson au profit de son frère Grant, étaient publiquement condamnées, ce qui annonçait de profonds changements avec une police « propre et juste ». Des changements que seule une poignée de politiciens pouvait croire. Rien ne changerait et une inexorable auto-destruction s’opérait dans les villes américaines, tandis que le délire sécuritaire s’amplifiait, inexorablement.
Dans ses pensées, Chase n’avait pas vu la serveuse se poster à sa gauche, attendant qu’il prenne une autre commande. Levant ses yeux usés et grattant sa barbe de plusieurs jours, il contempla la jeune femme dans son tablier bleu. Elle était jolie et lui fit penser à son ex-femme. Doris possédait les même yeux verts et ce sourire… Oui, Adrian s’en rappelait. Il se rappelait de leur rencontre, treize ans plus tôt. Il était encore à l’école de police et l’avait aperçu alors qu’il sortait s’amuser avec ses amis dans les pubs de la ville. Leur intention principale était bien sûr de faire la fête, de draguer et de boire jusqu’à l’aube. Mais Adrian avait abandonné ce projet au moment même où il avait croisé son regard vert. Elle était assise au bar, semblait peinée. Ses copines l’avait laissé seule, parties danser sur la piste. Attiré par cette demoiselle solitaire, le jeune blondinet n’avait pas hésité une seconde et s’était installé à côté d’elle. Avec ses manières envahissantes et son toupet, il lui avait tout de suite déplus. Qui était-il pour venir ainsi la déranger, alors qu’elle broyait du noir ? Mais Chase avait vaincu ses réticences et ils avaient entamé une discussion autour d’un verre de bière verte, servie spécialement à la Saint Patrick.
L’établissement appartenait à un irlandais, un cousin germain d’Adrian, et avait revêtu les couleurs du pays natal en ce jour de fête. C’était sous les cris de joie et les rythmes endiablés qu’ils avaient fais connaissance. Une peine de cœur avait amené Doris à suivre ses amies pour oublier et s’amuser un peu. Mais elle n’était pas prête, encore trop chagrinée pour ça. Après quelques bières et après avoir épuisé tout son lexique d’insultes castratrices anti-masculines, elle avait fini par accepter de danser et pendant toute la nuit, Adrian et elle avaient partagé la joie de vivre des irlandais, fiers de leurs racines. Au petit matin, elle lui avait glissé son numéro de téléphone puis elle était partie. Adrian était tombé amoureux d’elle.
« Vous souhaitez quelque chose, monsieur ? »
Chase cligna des yeux. La serveuse était encore là et semblait inquiète du regard peu délicat qu’il lui lançait. Détournant la tête, il répliqua :
« Non, non. Ca ira, merci. »
Puis il avala une gorgée de café. Il était amer, comme il l’aimait. Puis il tira une bouffée de sa cigarette et expira bruyamment. Cela faisait du bien, malgré ce que disaient les médecins. Chase en aurait presque apprécié les anciennes publicités des années soixante-dix des vendeurs de tabac. Il revoyait le cow-boy Marlboro sur son cheval, sa clope au bec, fier et viril. Un modèle pour tout les hommes de l’époque. Mais aujourd’hui, l’heure était aux campagnes anti-tabac et les fumeurs étaient assimilés à des drogués déphasés. Déphasé, il l’était après tout, alors qu’est-ce que ça pouvait faire ?
« Hum… Excusez-moi. Monsieur ? »
Un homme d’une quarantaine d’années, situé à la table de derrière, l’interpellait, avec un sourire forcé. Qu’est-ce qu’il voulait ? Chase lui fit un signe de tête pour l’interroger.
« Et bien, c’est votre cigarette. Elle me gène, voyez-vous. J’ai du mal à respirer quand il y a de la fumée autour de moi et… »
Et blablabla et blablabla. Putain d’asthmatique à la con. Son seul plaisir de la journée était anéanti par ce connard. Adrian écrasa sa clope en soupirant lourdement. Quel pays de merde. Un pays de libertés ? On pouvait flinguer à tout va, mais la clope, non, surtout pas ! C’était le Mal personnifié. A pisser de rire, ces conneries là. Maintenant, Chase se retrouvait sans destressant, entouré de non-fumeurs qui lui lançaient des regards désapprobateurs. Il jeta un coup d’œil à sa montre. 15 heures trente-deux. Elle était en retard.
Le son de la clochette en haut de la porte du café lui donna une raison de relever la tête. Une brune incendiaire venait de faire irruption. Chase lui fit un petit signe de la main et elle se retrouva en quelques secondes à sa table. Immédiatement, il reluqua son décolleté, ce qu’elle s’empressa de remarquer.
« Tu ne changeras jamais, Adrian. - Désolé, Trayce, c’est plus fort que moi. »
L’inspecteur Trayce eut un sourire. Son ex-coéquipier n’avait pas changé, et pour une fois, cela ne l’exaspérait pas. C’était la première fois qu’elle le voyait depuis trois semaines, c’est à dire depuis son renvoi définitif pour agression sur un petit voyou, lors d’une interpellation jugée trop violente par les nouveaux patrons de la police. Chase était parti sans un mot et s’était enfermé dans son appartement, à double tour, bien sûr. Il ne répondait pas au téléphone, ni aux coups frénétiques de Pat sur sa porte. Inquiète, elle en avait presque redouté qu’il eut fais une bêtise, celle-ci plus grave que les autres. A force de persévérance - elle était venu chaque jour tambouriner à sa porte - il avait fini par lui glisser un message sur le pallier où était écris un « Casse-toi » très conforme à l’individu. Énervée plus qu’il n’en fallait, elle avait répondu à sa missive par une autre ou elle lui fixait un rendez-vous au café en bas de chez lui. Elle avait également ajouté l’ultimatum suivant : si il ne se présentait pas, plus jamais il ne la reverrait. Pat pouvait constaté que Chase avait cédé à ses caprices et se trouvait maintenant en face d’elle.
« Alors, heureuse que je sois venu ? - Plutôt, oui. C’est un nouveau style, l’effet mal rasé et mal habillé ? »
Chase était vêtu d’un jean sale et d’un T-shirt autrefois noir, qui tournait au gris clair à certains endroits. Des auréoles de sueurs apparaissaient sur son poitrail et sous ses bras. Son visage était mangé par une sale barbe et ses cheveux blonds en bataille étaient gras. Un portrait peu reluisant de l’ancien inspecteur.
« Alors, comment vont les affaires depuis que je suis plus là ? - On m’a donné un nouvel équipier, un bleu qui pose tout le temps plein de questions et qui me matte quand j’ai le dos tourné. - Ca me rappelle quelqu’un. - Il est un peu plus subtile que toi, Adrian. Quoiqu’il en soit, il n’y connaît rien et je suis obligé de tout lui réapprendre. - On t’as filé une nouvelle enquête ? - Non, pas encore. Disons que t’avoir servi d’équipière n’a pas trop été apprécié en haut lieu et ils me mettent en stand by pour le moment. - Quelle bande de cons. T’es une flic géniale. La meilleure ». Pat rougit. Un compliment de la part de Chase était tellement rare. « Merci. Mais sans toi, c’est l’enfer. Tout le monde me regarde de travers depuis ton procès et je subis les moqueries de tes ennemis. - Laisse moi deviner : Pierce, Johnson, Nash et Chuck ? - Chuck a démissionné mais tu as raison pour les trois autres. - Excuse-moi. Si tu m’avais pas connu, tu serrais déjà lieutenant à l’heure qu’il est. - On a passé un an ensemble et je ne le regrette pas. Tu m’as appris plein de trucs. Tu as fais de moi une bonne flic et je t’en suis reconnaissant. - Bon, on va pas non plus sortir les mouchoirs, tu sais bien que je déteste ça. Alors, pourquoi tu voulais me voir, hein ? Juste pour répondre à mon commentaire attentionné sur ta présence incessante devant chez moi ? - Non. » | |
| | | La Rédac' Rédacteur
Nombre de messages : 1491 Date d'inscription : 02/12/2004
| Sujet: Re: Episode 1/12 Mar 12 Aoû - 21:46 | |
| Pat passa une main dans ses cheveux. Il avait raison. Une affaire délicate avait atterri au poste, confiée à Pierce et Johnson, ces deux inspecteurs lâches et incompétents. C’était un meurtre particulièrement sordide, celui d’une jeune handicapée mentale. Pour les deux policiers, ce n’était qu’une agression qui avait mal tourné mais Trayce avait la ferme conviction qu’un tueur était derrière cette histoire. Elle savait pertinemment qu’une nouvelle histoire de meurtres en séries comme en avait connu San Francisco ces derniers temps n’arrangerait pas les affaires de la nouvelle police. La dernière fois, le procureur Hart avait révélé aux citoyens un vaste réseau sectaire qui touchait les hautes sphères de San Francisco. De plus, le nouveau maire avait été retrouvé mort à son domicile, apparemment d’une crise cardiaque, mais l’autopsie n’avait pas encore était faite. Tout ce remue ménage avait alourdit l’atmosphère survoltée de ces derniers mois. Sans Francisco avait trop souffert depuis un an avec la guerre des gangs et le changement de pouvoir. Une affaire de trop finirait de détruire le moral des habitants et la réputation de la police. Aussi, ce meurtre sanglant allait-il être classé sans suite, pour éviter tout risque de débordement. C’était inacceptable pour Trayce qui avait été contrainte de s’écraser face au lieutenant Stein. Mais elle ne comptait pas en rester là et espérait l’aide d’un fin limier comme Adrian pour enquêter. Le convaincre allait être ardu mais elle était prête. Aussi sortit-elle de son sac à main une série de clichées qu’elle déposa sous les yeux de son ami.
Une trisomique âgée d’une quinzaine d’années gisait sur le sol d’une ruelle sale. On pouvait constaté les marques d’une strangulation sauvage autour de son cou et les multiples hématomes qu’elle avait reçu sur son corps nu. De plus, ses yeux avaient été arraché et elle semblait avoir été violée, comme le montrait le troisième cliché. C’était affreux. A vomir. Celui qui avait fais ça était un cinglé. Adrian détourna le regard.
« Pourquoi tu me montres ça, Pat ? - Cette fille s’appelle Maria Brown. Il y a une semaine, elle a été enlevée alors qu’elle se trouvait dans un centre spécialisé pour handicapés mentaux et physiques. Deux jours plus tard, on l’a retrouvé morte dans les rues de Bayview. La police veut faire croire à un acte isolé et veut étouffer l’affaire. Je crois que c’est en fait l’œuvre d’un serial killer et je souhaite l’attraper. »
Adrian déglutit. Il comprenait que Pat ait besoin de lui sur le coup mais c’était hors de question. Il avait été viré comme un malpropre de la police de San Francisco, avec des indemnités ridiculement basses. Il avait été blessé dans son honneur et n’était maintenant plus que l’ombre de lui-même. Et elle voulait qu’elle résout une enquête complexe, dans son état ? Elle voulait qu’il apprenne aux flics à faire leur boulot correctement ? Adrian soupira.
« Non. - Quoi, non ? - Je ne t’aiderai pas et tu le sais très bien. Je suis plus flic. PLUS flic. Tu comprends ce que ça signifie ? On m’a retiré ma plaque. Je n’ai pu le droit d’avoir accès aux dossiers de la police, je ne peux plus enquêter. Je ne suis qu’une pauvre merde sans le sous ! Putain, Trayce. Tu te ramènes ici comme si de rien était, avec ta petite affaire de meurtre sous le bras, croyant que je vais docilement, sans rétributions financières, régler l’histoire, trouver un malade découpeur de débiles mentaux, et tout ça, avec le sourire ? Nan mais bordel de merde, pour qui tu te prends ?! »
Chase s’était levé. Il fulminait intérieurement. Patricia ne réalisait pas à quel point il était mal. Retirer sa plaque avait été comme lui arracher son cœur. Il n’était qu’un fantôme sans âme maintenant qu’il n’était plus inspecteur de police. Il n’était plus rien d’autre qu’un tas de merde, un rebus de la société. Alors il était hors de question qu’il risque sa vie pour des flics qui l’avaient renvoyé sans vergogne, en lui riant au nez. Trayce sentit une boule dans sa gorge. Comment son ami pouvait-il réagir ainsi ? Elle pensait qu’il comprendrait mieux que quiconque qu’elle avait besoin d’aide mais au lieu de cela, il la rejetait violemment. Pleine de rage, elle se leva et lui fit face.
« Je pensais que t’étais un bon flic, Chase. Mais je me suis trompé sur ton compte. T’es qu’un looser même pas foutu d’élever tes gosses et d’accepter ta famille. Tu me dégoûtes. Non mais regarde-toi. Tu ressembles à un pauvre clochard. Tu veux abandonner, laisser tout tomber ? Ok ! Fais-le alors. Mais ne reviens plus jamais me parler de ton histoire du « bon flic ». »
Pat lança à Chase un regard noir puis décampa avant qu’il ait eu le temps de dire quoi que ce soit. Tout les clients du café s’étaient tournés vers la scène de dispute entre les deux anciens équipiers et amis. A présent, Adrian sentait les regards de tous sur lui. Il leur beugla :
« Quoi ? Vous voulez ma photo ? »
Puis d’un geste ample, il renversa son café et quitta l’établissement en maugréant des injures. Au bout de la rue, il vit Patricia courir, en pleurs. Qu’est-ce qu’elle connaissait à la vie, cette petite conne ? Elle était jeune et ne pouvait ressentir ce qu’il ressentait à cet instant. Il était seul et l’unique main tendue venait d’une policière qui voulait qu’il résolve une affaire pour elle. « En souvenir du bon vieux temps ». C’était idiot. Comme si tout pouvait se résoudre d’un coup de baguette magique. Comme si il pouvait se permettre de jouer aux détectives alors qu’il avait un loyer à payer, des factures qui s’entassaient dans sa boîte aux lettres et une pension alimentaire à verser. C’était loin d’être aussi facile qu’elle le pensait. Elle avait un salaire et un appartement payé par papa et maman. Lui n’avait rien de gratuit. Il n’avait plus rien du tout d’ailleurs. Elle était une gosse de riche, lui un ex-flic sans salaire. Secrètement, il avait répondu à une annonce dans le journal pour un emploi dans une station service. Il commençait demain mais n’avait pas voulu en informer Patricia. C’était un emploi précaire mais il percevrait un salaire et pourrait lutter contre ses dettes. C’était la dure loi de la réalité. Cela faisait certes l’effet d’un coup de poing dans le bide, mais c’était la vie. La vie réelle.
*
« Je vais retrouver celui qui a fais ça, Sarah. Je te le promet. »
La jeune femme releva la tête et fixa l’individu encapuchonné droit dans les yeux. Elle sécha ses larmes d’un revers de la main puis acquiesça d’un signe de tête. Elle ajouta, un rictus de rage déformant soudain son visage :
« Fais-le payer. Je t’en supplie, fais-le payer. Je veux qu’il souffre. Qu’il hurle. C’est ce qu’il mérite pour ce qu’il a fais ! »
Surprise par la force de sa propre voix, Sarah se mordit la lèvre inférieure.
« Ne t’inquiète pas. Il va payer. Je vais le tuer ! »
Sarah, rassurée par l’assurance de la personne providentielle, se blottit contre elle et sentit des larmes inonder une nouvelle fois son visage. Elle espérait au fond d’elle même que les paroles prononcées par l’autre soient véridiques mais elle avait confiance. Une confiance totale. Le sang allait être versé. | |
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